La cession de créance entre entreprise du secteur bancaire est une pratique courante, mais source d’incompréhension de la part de nombreux consommateurs que nous rencontrons. En pratique, le débiteur en indélicatesse reçoit un courrier d’une société de recouvrement ou d’une étude de Commissaire de justice l’informant que sa dette a été rachetée et qu’il doit désormais régler sa créance à une nouvelle entreprise, dont il n’a jamais entendu parler. Alors comment réagir dans cette situation? Voici nos conseils.
Pratique assez courante entre les entreprises, la cession de créance est un mécanisme qui permet à une entreprise (le cédant) de transférer ses créances à une autre partie (le cessionnaire) en échange d’une contrepartie financière.
Régie par l’article 1321 du code civil, il faut noter que le consentement du débiteur n’est pas requis, à moins que la créance ait été stipulée dans le contrat incessible pour les deux parties.
C’est pourquoi, le consommateur n’est pas averti à l’avance de la vente de sa créance et ne peut généralement pas s’y opposer, une fois qu’il a été notifié par courrier du rachat ou de la cession de celle-ci.
Notez, qu’une fois notifié, l’interlocuteur du consommateur sera désormais le cessionnaire (l’entreprise qui aura racheté la créance), ou le cabinet qu’il mandate pour recouvrer la créance et non plus celui auprès duquel il a initialement souscrit le contrat. D’ailleurs, c’est bien au cessionnaire qu’il devra régler désormais les sommes dues ou discuter à ce sujet.
Car oui, le débiteur peut opposer au cessionnaire les exceptions inhérentes à la dette, telles que la nullité, l’exception d’inexécution, la résolution ou la compensation des dettes connexes. Il peut également opposer les exceptions nées de ses rapports avec le cédant avant que la cession lui soit devenue opposable, telles que l’octroi d’un terme, la remise de dette ou la compensation de dettes non connexes (article 1324 du code civil).
Plus simplement dit le consommateur pourra opposer au concessionnaire ou son mandant une remise de dette obtenue par le créancier initial voir les mesures obtenues dans une décision de justice (exemple des délais de paiement de 24 mois) ou par un dossier de surendettement. C’est pourquoi, on ne vous conseillera jamais assez de conserver les justificatifs de vos créances non soldées, même si elles ont fait l’objet d’un effacement des dettes ou d’un plan d’apurement par la banque de France.
D’autant qu’il n’est pas rare que le cessionnaire n’ait pas l’ensemble des pièces de votre dossier, et ignore l’existence de remises voire l’effacement des sommes obtenues, d’autant plus si la créance cédée est ancienne.
Attention, qui dit créance ancienne ne veut pas forcément dire créance prescrite ou forclose, surtout si le créancier initial avait obtenu un titre exécutoire (un jugement ou une injonction de payer à votre encontre). Par exemple, en matière de crédit à la consommation, la dette est forclose, si le créancier n’exerce aucun recours en justice dans les deux ans suivants le premier impayé non régularisé. Mais, une fois la décision de justice obtenue, ce titre exécutoire se prescrit sur 10 ans depuis la loi du 17 juin 2018 portant réforme des prescriptions civiles (et 30 ans avant l’entrée en vigueur de cette loi). Si vous êtes dans ce cas de figure, renseignez-vous toujours auprès d’une association de défense des consommateurs.
Autre sujet de discorde entre le consommateur et le cessionnaire, les pratiques parfois musclées des sociétés de recouvrement mandatées pour recouvrer les sommes, qui usent de discours ou pratiques très discutables (appels incessants, menaces de saisies en l’absence de titre exécutoire), d’autant que les créances concernées sont souvent anciennes, et parfois les consommateurs ont même oublié leurs existences.
Il serait temps que ce sujet soit débattu entre les parties prenantes (représentants des consommateurs, représentants des professionnels et pouvoir public) pour assainir les relations entre les consommateurs et cessionnaires et leurs mandants dans la phase de recouvrement de la créance.