Avec l’expulsion locative, la saisie immobilière est la procédure qui impacte le plus le logement surtout si celui-ci constitue la résidence principale du propriétaire.
La saisie immobilière intéresse tous types de bien immobilier (maison, appartement…) et intervient lorsque toutes les démarches amiables en vue de recouvrer l’(les) impayé (s) s’est (se sont) avéré(s ) infructueuses.
Généralement cette situation découle de la défaillance de l’emprunteur principal qui ne rembourse plus ses échéances au prêteur (le plus souvent banque ou organisme de crédit). Elle peut également être diligentée par le syndicat des copropriétaires si l’un des copropriétaires ne paie pas ses charges de copropriété. Néanmoins, le débiteur a pu, en toute bonne foi, rencontrer des difficultés financières insurmontables (décès d’un des conjoints, maladie, licenciement…) qui l’ont conduit à ne plus pouvoir faire face à ses engagements.
Très formalisée, cette procédure nécessite d’être représentée par un avocat (article R311-4 du code de procédure civile d’exécution).
De plus, à l’instar des autres saisies, la saisie immobilière ne peut être introduite qu’à la condition que le créancier soit muni d’un titre exécutoire définitif (décision de justice ou acte notarié revêtu de la formule exécutoire).
Cette procédure est déterminante en ce qu’elle va trancher le devenir du bien immobilier et conclure soit à sa vente amiable soit à sa vente forcée.
I/ Le commandement de payer valant saisie-vente: premier acte de la procédure
Comme pour l’expulsion locative, la procédure de saisie immobilière débute par un commandement de payer valant saisie immobilière initié par le créancier poursuivant. L’acte est présenté par un huissier de justice (signification). Le commandement de payer indique au débiteur l’obligation de payer la somme due dans les 8 jours.
Selon l’article R321-3 du code des procédures civiles d’exécution (CPCE), le commandement doit comporter des mentions obligatoires spécifiques à peine de nullité parmi lesquelles :
• La constitution d’avocat du créancier poursuivant, laquelle emporte élection de domicile
• l’indication de la date et de la nature du titre exécutoire en vertu duquel le commandement est délivré
• le décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus
• l’indication du taux des intérêts moratoires
• l’avertissement que le débiteur doit payer ces sommes dans un délai de huit jours
• qu’à défaut de paiement, la procédure à fin de vente de l’immeuble se poursuivra et qu’à cet effet, le débiteur sera assigné à comparaître à une audience du juge de l’exécution pour voir statuer sur les modalités de la procédure etc…
Bon à savoir : la durée de validité du commandement de payer valant saisie vente est de cinq ans suivant sa publication au fichier immobilier du service de la publicité foncière du lieu de situation de l’immeuble.
Cette publication intervient impérativement dans un délai de deux mois à compter de la date de signification faite au débiteur. À défaut de respecter ce délai, la caducité du commandement est encourue.
Cela signifie que les effets du commandement de payer cessent de plein droit dans les cinq ans à compter de sa signification (article R321-20 CPCE). C’est au juge de l’exécution auprès du tribunal judiciaire du lieu de situation de l’immeuble qu’il appartient de constater la caducité du commandement.
A partir du commandement de payer valant saisie-vente, le bien ainsi que les fruits (tels les loyers) deviennent indisponibles. Vous ne pouvez plus ni le vendre ni disposer librement des loyers.
Ce commandement est signifié par voie d’huissier au débiteur qui dispose d’un délai de 8 jours à compter de la signification pour s’acquitter du paiement de cette dette.
Le commandement est ensuite publié au service de publicité foncière (anciennement bureau des hypothèques) dans les deux mois à compter de sa délivrance au débiteur, à peine de caducité.
Bon à savoir : Si le débiteur possède plusieurs biens immobiliers, il peut demander au juge de l’exécution (JEX) que les effets de la saisie soient cantonnés à un seul de ses biens s’il peut prouver que la valeur de ce bien permet de désintéresser le(s) créancier(s) poursuivant(s) et les créanciers inscrits (article R321-12 CPCE).
A partir du commandement de payer, l’huissier de justice peut pénétrer dans les lieux afin de dresser un procès-verbal portant description de l’immeuble (superficie, composition…). Il précise également l’identité des occupants, les coordonnées du syndic et tous éléments utiles sur l’immeuble.
Attention, l’huissier de justice instrumentaire peut accéder au bien immobilier même en cas de refus du propriétaire saisi. Dans ce cas, il se fait accompagner par le maire, un conseiller municipal ou un fonctionnaire municipal délégué par le maire à cette fin, par une autorité de police (ou de gendarmerie) ou par 2 témoins (qui sont sans lien avec lui ou le créancier) ainsi qu’un serrurier afin de se faire ouvrir les locaux.
Sauf si le bien immobilier objet de la saisie est loué, c’est le débiteur saisi qui en est constitué séquestre. Il dispose donc de l’usage du bien mais ne peut faire aucun acte de disposition ni aucun acte matériel susceptible d’attenter à la valeur du bien.
Lorsque le commandement de payer valant saisie vente est demeuré infructueux, l’huissier délivre au débiteur dans les deux mois une assignation à comparaître devant le juge de l’exécution auprès du tribunal judiciaire du lieu de situation de l’immeuble.
Cette assignation intervient au plus tôt 3 mois et au plus tard un mois avant la date d’audience dite audience d’orientation (article R322-4 CPCE).
L’assignation à comparaitre du débiteur devant le JEX à l’audience d’orientation doit comporter les mentions visées à l’article R322-5 du CPCE en particulier : les lieu, jour et heure de l’audience d’orientation du juge de l’exécution, l’indication que l’audience d’orientation a pour objet d’examiner la validité de la saisie, de statuer sur les contestations et demandes incidentes liées à celle-ci et de déterminer les modalités selon lesquelles la procédure sera poursuivie ; l’information que, si le débiteur n’est pas présent ou représenté par un avocat à l’audience, la procédure sera poursuivie en vente forcée, sur les seules indications fournies par le créancier, …
Au plus tard le cinquième jour ouvrable suivant l’assignation délivrée au débiteur saisi, le créancier poursuivant dépose au greffe du juge de l’exécution un cahier des conditions de vente comportant l’état descriptif de l’immeuble et les modalités de la vente. Il y est joint la copie de l’assignation délivrée au débiteur et un état hypothécaire certifié à la date de la publication du commandement de payer valant saisie (article R322-10 CPCE).
II/ L’audience d’orientation devant le juge de l’exécution
L’audience d’orientation est décisive car elle permet au débiteur d’obtenir des délais pour la vente amiable de son bien (les délais ne sont pas accordés de manière systématique et sont laissés à la discrétion du juge de l’exécution).
Elle est également l’occasion d’émettre des contestations, de solliciter des délais de relogement suite à la vente forcée du bien, de solliciter la suspension de la procédure d’adjudication suite à la recevabilité du dossier de surendettement (articles L721-7, R721-7 et R721-8 du code de la consommation).
L’audience d’orientation peut également mettre fin, suspendre ou interrompre la procédure de saisie immobilière.
Selon l’article R322-15 du code des procédures civiles d’exécution : « A l’audience d’orientation, le juge de l’exécution, après avoir entendu les parties présentes ou représentées, vérifie que les conditions des articles L.311-2, L.311-4 et L.311-6 (en particulier l’existence d’un titre exécutoire) sont réunies, statue sur les éventuelles contestations et demandes incidentes et détermine les modalités de poursuite de la procédure, en autorisant la vente amiable à la demande du débiteur ou en ordonnant la vente forcée.
Lorsqu’il autorise la vente amiable, le juge s’assure qu’elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur ».
Bon à savoir : Dans tous les cas ne manquez pas de vous présenter à l’audience d’orientation car l’enjeu est important. Idéalement, rendez-vous à l’audience avec un compromis de vente signé. En l’absence d’un compromis, munissez-vous d’un mandat (exclusif ou non) signé avec une agence immobilière qui prouve votre volonté de vendre le bien à l’amiable.
L’audience est orale et le juge entend les parties présentes et/ou représentées et leurs contestations éventuelles. Il décide des suites de la procédure c’est-à-dire la vente amiable ou forcée du bien immobilier ou encore la suspension, interruption, ou la fin de la procédure d’exécution dans le cadre d’un jugement d’orientation.
Le greffe du tribunal judiciaire notifie le jugement par lettre recommandée avec avis de réception. Une copie est également adressée par lettre simple à l’huissier instrumentaire et aux parties.
Le jugement d’orientation est susceptible d’appel dans les 15 jours de sa notification.
III/ La vente du bien
La vente amiable
Elle peut être demandée oralement au cours de l’audience.
Cette vente doit être autorisée judiciairement. C’est donc le juge qui accorde ou non la possibilité de vendre le bien à l’amiable et qui fixe le prix en deçà duquel le bien ne peut être vendu.
Le créancier s’assure que le débiteur effectue toutes les diligences pour parvenir à la vente amiable du bien et il peut saisir le juge de l’exécution s’il constate la carence du débiteur. Il sollicite alors la reprise de la procédure de vente forcée.
Lorsque le juge de l’exécution tranche en faveur de la vente amiable du bien, une nouvelle audience est fixée dans un délai de 4 mois pour vérifier la situation.
Ce délai doit donc être mis à profit par le débiteur saisi pour réaliser la vente effective du bien notamment si un compromis de vente a pu être signé et présenté lors de l’audience d’orientation. Dans le cas où le débiteur produit un compromis de vente qu’il n’avait pas lors de la première audience, le juge peut accorder un délai supplémentaire de 3 mois pour la rédaction et la conclusion de l’acte authentique de vente.
Une nouvelle audience de rappel pour constater la vente est donc fixée au cours de laquelle le juge vérifie que l’acte de vente est conforme aux conditions qu’il a fixées.
Lorsque la vente amiable se réalise au tarif convenu par les parties et permet de solder votre dette, l’excédent vous est alors reversé. A l’inverse, si la vente amiable ne permet pas d’apurer intégralement vos dettes, vous restez redevable du solde.
Toutefois, la vente amiable peut ne pas aboutir : le juge fixe alors une date d’adjudication.
La vente forcée
Le montant de la mise à prix est fixé par le créancier poursuivant. Néanmoins, le débiteur peut, en cas d’insuffisance manifeste du montant de la mise à prix, saisir le juge afin de voir fixer une mise à prix en rapport avec la valeur vénale de l’immeuble et les conditions du marché (article L322-6 du CPCE).
Dans l’hypothèse où le juge n’a pas accordé de délai au débiteur (ou si celui-ci n’était ni comparant ni représenté à l’audience), il fixe la date de l’adjudication (vente forcée). Il est alors publié dans les journaux d’annonces légales un descriptif du bien pour toucher le plus grand nombre d’acquéreurs potentiels. Un avis (PV) est également affiché sur l’immeuble par l’huissier de justice instrumentaire.
La vente a lieu aux enchères publiques à l’audience du juge de l’exécution.
L’enchère est remportée par l’adjudicataire (l’acquéreur) le plus offrant par le biais de l’avocat (inscrit au barreau du tribunal judiciaire où la vente a lieu) qui seul est habilité à enchérir. A défaut d’adjudicataire, c’est le créancier poursuivant qui remporte la mise, il est alors déclaré adjudicataire d’office à hauteur de ce montant.
L’adjudicataire verse le prix sur un compte séquestre ou le consigne auprès de la Caisse des dépôts et consignations et paie les frais de la vente parmi lesquelles les frais de représentation de l’avocat, frais de poursuite, frais de publication du jugement d’adjudication etc…
L’adjudication entraine la vente forcée du bien saisi et transfère la propriété à l’adjudicataire (créancier poursuivant ou acquéreur).
Le jugement d’adjudication vaut titre d’expulsion du débiteur (article L322-13 CPCE) et de tous les occupants de son chef.
Seul le jugement d’adjudication qui statue sur une contestation est susceptible d’appel de ce chef dans un délai de quinze jours à compter de sa notification.
Sans nouvelles enchères dans le délai de 10 jours, l’adjudication est définitive à condition de régler le prix et les frais de la vente dans les deux mois.
Toutefois, dans les 10 jours de la vente une surenchère peut intervenir par exemple si l’acheteur adjudicataire n’a pas consigné le prix dans le délai.
Une nouvelle enchère a alors lieu dans les conditions de la première vente.
Notre conseil : L’attachement sentimental à votre bien immobilier est compréhensible car il est le lieu où vous avez de bons souvenirs comme la naissance de vos enfants ou alors s’il s’agit d’un héritage familial. Cependant, conserver son bien à tout prix n’est pas réaliste ni recommandé si matériellement, vous ne disposez pas des ressources suffisantes pour faire face à son entretien et ne parvenez pas ou très difficilement à régler les charges de copropriété, le crédit immobilier et les impôts afférents au bien. Une vente réalisée dans de bonnes conditions hors de toute procédure de saisie immobilière peut s’avérer une bonne solution et vous aider à repartir sur de meilleures bases.