Les parties prenantes au cœur de l’élaboration des normes
En France, l’importance de l’implication des parties prenantes a été réaffirmée par le décret du 16 juin 2009 qui définit la normalisation comme : « une activité d’intérêt général qui a pour objet de fournir des documents de référence élaborés de manière consensuelle par toutes les parties intéressées… »
Les professionnels, financeurs du processus, sont à ce titre la première partie prenante du système qui, rappelons-le, est privé. Ils acceptent de se conformer aux exigences de la norme qui constitue une référence, un gage de sérieux et peut être utilisée comme un argument de promotion commerciale auprès des clients et un moyen efficace de se démarquer des concurrents qui n’y font pas référence.
Les pouvoirs publics en tant que « gendarmes du marché » s’intéressent également à la normalisation des produits et services à l’échelle nationale.
Les représentants des consommateurs ont toute leur place au sein des systèmes de normalisation national, européen et international. En effet, les normes font partie intégrante de la protection des consommateurs en ce qu’elles sous-tendent le plus souvent la législation nationale. Elles aident à appuyer les droits fondamentaux des consommateurs. Ces éléments fondamentaux de la protection des consommateurs sont énoncés dans les principes directeurs des Nations unies pour la protection du consommateur qui trouvent leur origine dans la déclaration de l’ancien président des États-Unis, John F. Kennedy, du 15 mars 1962 devant le congrès américain, définissant les droits fondamentaux du consommateur comme le droit à des produits sûrs et sains, le droit d’être informé, le droit de choisir, le droit d’être représenté. Le mouvement de consommateurs qui s’exprime à travers Consumers International a ajouté les quatre droits supplémentaires suivants : le droit à la satisfaction des besoins de base, le droit à la réparation, le droit à l’éducation, le droit à un environnement sain.
Ainsi, nous considérons que les normes internationales, européennes ou nationales appuient ces droits fondamentaux du consommateur en aidant à relever les niveaux de qualité, de sécurité, de fiabilité.
Les associations de consommateurs représentent les utilisateurs, les acheteurs des produits, et des services mis sur le marché. L’implication de leurs représentants dans le système de normalisation est donc indispensable pour la prise en compte des besoins des clients, en matière de qualité, de sécurité, de fiabilité, de confort et de facilité d’emploi et d’information.
Plus les consommateurs s’impliquent activement dans l’élaboration des normes, plus les produits et services seront à même de répondre à leurs besoins. Il en résulte une situation gagnant-gagnant entre le consommateur et le producteur ou le prestataire de service.
Les consommateurs sont véritablement concernés par tous les travaux de normalisation, mêmes ceux à caractère très techniques. Ainsi, par exemple, s’agissant des câbles nécessaires pour recharger les batteries des téléphones portables, ordinateurs portables, tablettes numériques… Les représentants des consommateurs réclament depuis de nombreuses années une norme permettant la standardisation de ces chargeurs de batteries. En effet, cette normalisation technique aurait un impact très important dans la vie du consommateur : l’interopérabilité. Il pourrait enfin brancher son PC portable, sa tablette, son mobile, son appareil photo grâce au même câble d’alimentation, quel gain de place et quel impact sur l’environnement !
A l’échelle nationale, les représentants des consommateurs disposent d’un comité consommation directement rattaché au Conseil d’administration d’Afnor, composé de 16 membres dont 7 représentants d’associations nationales de consommateurs désignés par le Conseil national de la consommation (CNC), d’un représentant de l’Institut national de la consommation (INC) et d’un représentant de la Commission de la sécurité des consommateurs (CSC). Le comité consommation est un lieu d’échange et en son sein sont notamment préparées les positions françaises à défendre au COPOLCO (Comité consommateurs de l’ISO).
Par ailleurs, chaque association nationale est représentée au sein d’un groupe élargi « le groupe priorités des consommateurs » qui permet aux représentants des consommateurs de contribuer à l’élaboration du programme normalisation.
A l’échelle européenne une association porte la parole des consommateurs : l’ANEC. Son siège est situé à Bruxelles.
Les activités de normalisation pro ou anti-concurrentielles ?
En janvier 2014, l’Autorité de la concurrence a décidé d’ouvrir une enquête sectorielle afin d’évaluer le fonctionnement concurrentiel des processus de normalisation et de certification.
Avant d’adopter ses conclusions définitives, l’Autorité a publié une première évaluation qu’elle soumet à consultation publique. Les différents acteurs intéressés ont été invités à faire valoir leurs observations sur les points de blocage et les premières pistes de recommandations avancées par l’Autorité de la concurrence.
Trois points en particulier ont retenu l’attention de l’Autorité de la concurrence:
- L’Autorité estime tout d’abord qu’il est nécessaire de renforcer la prise en compte de l’intérêt général dans le processus de normalisation, qui, en pratique, s’appuie sur les compétences techniques et les capacités financières des opérateurs privés. Or, cette intervention de la sphère privée peut entraîner des risques de collusion et conduire à une capture de la norme qui contribuerait à élever des barrières artificielles pour les nouveaux entrants.
- L’Autorité pointe ensuite les risques de confusion qui peuvent exister entre activités de normalisation et de certification de certains opérateurs
- Enfin, l’Autorité a examiné en particulier le secteur du BTP, qui en raison de l’existence de documents à caractère normatif spécifiques sont susceptibles, d’une part, d’expliquer les difficultés de certaines entreprises d’entrer dans le secteur et, d’autre part, de contribuer à surenchérir le coût de la construction.
Quarante-six questions sont posées aux acteurs intéressés dans le cadre d’une consultation publique ouverte du 13 avril au 1er juin 2015. L’ALLDC, très engagée en normalisation a répondu à la consultation et vous invite à prendre connaissance du document soumis à consultation et de sa contribution.
Réponse de l’Association Léo Lagrange pour la défense des consommateurs à l’Autorité de la concurrence sur la normalisation
Politique nationale de normalisation et stratégie pour la compétitivité de notre économie
Le Ministre de l’économie, du redressement productif et du numérique a confié à la Déléguée interministérielle aux normes placée auprès de lui, Madame Lydie Evrard, à l’occasion de la nomination de celle-ci, la mission d’une part, d’analyser le fonctionnement du système français de normalisation et d’autre part, de formuler des propositions pour mettre en œuvre une stratégie de normalisation qui soit résolument au service de la politique industrielle de la France. Le rapport a été remis au ministre et publié en décembre 2014.
La Déléguée Interministérielle aux normes propose des axes d’amélioration de la gouvernance du système français de normalisation, une meilleure prise en compte de la dimension stratégique avec notamment des liens plus forts avec les priorités ministérielles. Elle préconise le développement d’une vision partagée entre parties intéressées.
Elle émet des recommandations en faveur de l’élaboration et de la mise en œuvre d’un politique de normalisation, la création d’un conseil d’orientation de la politique de normalisation chargé d’élaborer cette politique. Cette instance serait présidée par le ministre, avec un vice-président représentant les acteurs économiques.
Elle recommande la mise en place d’une politique de normalisation par plans d’action triennaux, s’inscrivant dans une dynamique d’amélioration continue. S’agissant de 2015-2017 : deux axes ont été retenus : développer une vision stratégique et accroitre la performance du système français de normalisation.
Les recommandations et préconisations seront prochainement mises en œuvre. La société civile dont les représentants des consommateurs doivent rester présents à tous les niveaux. Il semble qu’un siège leur soit réservé au sein du COPN. Nous resterons à l’écoute de toute avancée dans la mise en œuvre de ces recommandations.
Pour en savoir plus voir le rapport dans son intégralité