En France, on compte environ 120 000 divorces chaque année (chiffres ministère de la justice). Mais au moment de la séparation du couple, la question de la répartition des dettes accumulées pendant la vie commune se pose. Plus spécifiquement en matière fiscale, les dettes sont-elles réparties équitablement entre les ex-conjoints ? Quels sont les recours d’un ex-conjoint qui se voit contraint par l’administration fiscale de payer une dette dont il n’avait pas connaissance? Dans certains cas, il est possible de solliciter une décharge de responsabilité solidaire. Un dispositif qui vient d’être complété par la loi n°2024-494 du 31 mai 2024 pour une justice patrimoniale au sein de la famille. Retour sur ce dispositif.
En principe, les dettes de la vie courante (loyer, énergie, cantine, impôts) relatives à l’entretien du ménage et l’éducation des enfants engagent solidairement les couples mariés ou pacsés (article 220 ou 515-4 du code civil). Les époux/partenaires sont donc solidaires des dettes fiscales nées pendant le mariage. En cas de séparation, l’administration fiscale peut ainsi réclamer l’impôt indifféremment à l’un à l’autre des ex-époux.
Or, il peut arriver que l’un des époux n’ait pas sciemment déclaré ses impôts ou dissimulé une partie de ses revenus en laissant dans l’ignorance son conjoint. Au moment de la séparation, l’administration fiscale exige alors le paiement de l’arriéré (taxe foncière, taxe d’habitation, IFI) à l’un des ex-conjoints, pour la période antérieure à la séparation (article 1691 bis du code général des impôts).
Pire, c’est parfois au moment de la saisie à tiers détenteur (SATD) que l’ex-conjoint découvre le pot aux roses !
Face à cette situation, l’administration a mis en place une procédure : la décharge de responsabilité solidaire. Elle permet de demander d’être déchargé légalement de l’obligation de paiement des impôts. La demande de décharge de solidarité doit en principe être adressée par écrit au directeur départemental des finances publiques du lieu d’établissement des impositions concernées, lequel dispose d’un délai de six mois pour se prononcer.
Néanmoins, pour bénéficier de cette décharge de responsabilité, il faut remplir 3 conditions strictes : la rupture de la vie commune, la disproportion entre le montant de la dette fiscale et sa situation financière et patrimoniale et un comportement fiscale irréprochable depuis la rupture de la vie commune.
Toutefois, l’administration fiscale considère qu’il n’y a pas de disproportion marquée si le demandeur est en capacité de rembourser la dette fiscale en moins de 3 ans à l’aide de son patrimoine ou de ses revenus.
La loi pour la justice patrimoniale au sein de la famille, entrée en vigueur le 2 juin 2024, vient assouplir ce dispositif. Ainsi, elle met en place une procédure de décharge gracieuse (article L247 du Code des procédures fiscales), permettant à l’administration fiscale d’accorder une décharge de responsabilité solidaire même en en l’absence de « disproportion marquée ».
Désormais, les personnes divorcées (ou en cas de rupture de PACS) peuvent être ainsi déclarées tiers à la dette et ne pas payer les impositions communes. Il suffira à l’ex-conjoint de démontrer sa bonne foi et qu’il n’a tiré aucun profit de cette situation.
En cas d’acceptation par l’administration, seul le contribuable à l’origine de la fraude est responsable du remboursement de la dette. De plus, si la somme a déjà été réglée par l’ex-conjoint étranger à la dette auprès du Fisc, il peut dorénavant demander la restitution des sommes payées. Auparavant, les sommes payées étaient définitivement acquises à l’administration fiscale.
Cette procédure n’est pas automatique. Elle suppose que l’ex-conjoint effectue ce recours gracieux auprès de l’administration fiscale laquelle appréciera souverainement la situation pour décharger totalement ou partiellement l’ex-conjoint ou partenaire. Cette procédure n’est pas forcément connue puisque certains consommateurs décident, face au montant réclamé, de déposer un dossier de surendettement. Il est donc important pour notre association de la faire connaître.